Au décès d’un époux marié, le conjoint survivant a droit à une part dans sa succession. Et celle-ci n’est pas toujours adaptée aux besoins qui sont les siens à ce moment-là. La loi permet de pallier cela et d’avantager le conjoint survivant. On parle de « donation au dernier vivant » (ou donation entre époux). En quoi consiste-t-elle et quels peuvent être les frais ? Y a-t-il une différence entre donation entre époux et donation au dernier vivant ? Quelle est l’incidence sur la succession ? Voyons tout cela ensemble !
Sommaire
La donation au dernier vivant, c’est quoi ?
Les expressions “donation au dernier vivant” et “donation entre époux” sont parfaitement synonymes. Il n’existe donc pas de différence entre les deux. Ce type de donation a un objectif simple. Il s’agit pour une personne mariée d’augmenter la part d’héritage que percevra son conjoint lorsqu’elle viendra à décéder. Via une donation au dernier vivant, on améliore donc la situation du conjoint survivant. Ce dernier recevra plus que prévu (que ce qu’il aurait eu sans donation entre époux).
La donation entre époux, à l’inverse d’une donation classique, ne prend donc effet qu’au décès de celui qui l’a consentie.
Codifiée dans le Code civil, la donation entre époux se fait devant notaire (ou plus rarement, par testament). Et elle est envisageable quel que soit le régime matrimonial. Il est donc tout à fait possible de faire une donation au dernier vivant en régime de séparation de corps. Elle peut être unilatérale ou réciproque. Dans ce second cas, chaque époux consent une donation au dernier vivant au profit de l’autre. Précisons que la donation au dernier vivant n’est pas ouverte aux couples non mariés.
Un époux ne pourra pas toujours donner l’intégralité de son patrimoine, à son décès, au conjoint survivant. La part maximum qu’il sera possible de donner dépendra de la composition familiale (de la présence d’enfants ou non).
La donation au dernier vivant peut être annulée à tout moment, sauf si elle est établie au sein du contrat de mariage. En dehors de ce cas, l’annulation pourra se faire par testament ou devant notaire. Aucune justification n’est requise. De même, si un époux révoque sa donation entre époux, l’autre n’en sera pas informé. Et ce même si les deux ont fait une donation au profit de l’autre.
Pour bien cerner l’intérêt de la donation au dernier vivant pour protéger son conjoint survivant, voyons les droits de ce dernier dans une succession « classique » :
Famille du défunt | Part du conjoint survivant |
---|---|
Enfants communs uniquement | 1/4 en pleine propriété ou la totalité en usufruit |
Au moins un enfant d’un autre lit | 1/4 en pleine propriété |
Les deux parents | 1/2 en pleine propriété |
Un seul parent | 3/4 en pleine propriété |
Pas d’enfants, pas de parents | Totalité de l’héritage en pleine propriété |
Quelle part peut-on donner via une donation au dernier vivant ?
Nous l’avons dit, la part que l’on peut réserver au conjoint survivant en cas de décès dépend de la présence d’enfants. S’il y en a, on fera aussi la distinction selon que les enfants sont tous issus du couple ou non (enfants d’un premier lit).
Tous les enfants sont issus du couple
Si tous les enfants sont issus du couple, un époux pourra donner, via une donation au dernier vivant :
- 1/4 de la succession en pleine-propriété et les autres 3/4 en usufruit,
- 100 % de la succession en usufruit : solution souvent conseillée quand les époux sont déjà âgés. Le conjoint survivant pourra ainsi percevoir les fruits de l’épargne, conserver le logement… Attention toutefois : il ne pourra pas vendre les biens, car il n’en a pas la propriété. La donation au dernier vivant ne lui permet donc pas, s’il opte pour cette solution, de procéder à la vente de la maison.
- L’intégralité de la « quotité disponible » en pleine propriété. La quotité disponible est la fraction dont on peut librement disposer sur son patrimoine (en présence d’héritiers « réservataires », qui ont droit à une fraction minimale). Elle dépend du nombre d’enfants. S’il n’y en a qu’un, la quotité disponible est de 50 %. S’il y a eu une donation entre époux, le conjoint survivant pourra donc récupérer la moitié de la succession en pleine propriété. Mais la quotité est plus basse s’il y a plus d’enfants (1/3 s’il y en a 2, et 1/4 s’il y en a 3 ou plus).
Donation au dernier vivant et usufruit, et nue-propriété… Ces notions sont en réalité plus simples qu’il n’y paraît. L’usufruit est tout simplement le droit de percevoir les fruits d’un bien et d’en jouir : intérêts d’un compte épargne, revenus locatifs, droit à habiter un logement… La nue-propriété est le droit de disposer du bien (de le vendre par exemple). À l’extinction de l’usufruit, la pleine propriété se reconstitue entre les mains de celui qui n’avait jusque là que la nue propriété.
La donation entre époux est ici une vraie protection du conjoint survivant. Ce dernier recevra plus que ce à quoi il aurait eu droit sans. En l’absence de donation au dernier vivant, il aurait seulement eu 1/4 de la succession en pleine propriété (sans usufruit en plus) ou l’usufruit sur la totalité. Il n’aurait pas pu opter pour la quotité disponible.
Famille du défunt | Part que peut recevoir le conjoint survivant |
---|---|
1 enfant | Au choix : – 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit – 100 % en usufruit – La quotité disponible (50 % en pleine propriété) |
2 enfants | Au choix : – 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit – 100 % en usufruit – La quotité disponible (33 % en pleine propriété) |
3 enfants ou + | Au choix : – 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit – 100 % en usufruit – La quotité disponible (25 % en pleine propriété) |
Autres membres (parents, frères et sœurs…) | La totalité en pleine propriété |
Défunt avec enfants de plusieurs lits, ou sans enfant
Si le défunt a eu des enfants d’un premier lit, le conjoint survivant bénéficiaire d’une donation entre époux n’aura pas de choix au décès. Il recevra le quart de la succession en pleine propriété.
Si le défunt n’avait pas d’enfant, la donation au dernier vivant est encore plus protectrice. Le conjoint survivant pourra recevoir la totalité de la succession. Précision quand même : les ascendants (père et mère) pourront utiliser leur « droit de retour » sur des biens donnés.
Comment faire une donation au dernier vivant entre époux ?
Une donation entre époux se fait en général pendant le mariage, devant notaire. Il est possible de l’intégrer dans le contrat de mariage, ou de la faire plus tard par acte notarié. Il est également admis de la faire avant le mariage, mais elle sera sans effet si celui-ci ne se fait pas.
Mais alors, donation entre époux ou testament ? En réalité, il est possible de consentir les mêmes droits via les deux. La donation entre époux devant notaire est toutefois plus « sécuritaire », même si elle a un coût (qui reste raisonnable). En passant par un notaire, l’acte sera enregistré au Fichier central des dispositions de dernières volontés (FCDDV).
Quelques documents seront à fournir pour votre donation au dernier vivant. Vous profiterez au passage des conseils du notaire. Il vous expliquera en détails les tenants et aboutissants d’un tel acte. Et cela n’est jamais superflu, surtout si vous procédez à une donation au dernier vivant au sein d’une famille recomposée. Le notaire pourra également vous aiguiller si vous souhaitez limiter ou préciser les droits du conjoint survivant dans l’acte.
Lorsque l’on intègre une donation entre époux dans le contrat de mariage, on la rend irrévocable (sauf en cas de divorce). Si on la fait plus tard par acte authentique, elle pourra être annulée à tout moment.
Donation au dernier vivant et succession : comment ça marche ?
La donation au dernier vivant ne joue qu’au décès de celui qui l’a consentie à son époux. Et elle porte sur les biens qui sont effectivement présents dans son patrimoine à son décès.
Le conjoint survivant aura le choix, selon les règles que nous avons vues plus haut, selon qu’il y ait des enfants ou non. C’est lui qui optera, s’il n’y a par exemple que des enfants du couple, pour la totalité en usufruit, la quotité disponible… Précisons tout de même que l’époux décédé pourra aussi avoir limité ses choix. L’acte pourra par exemple préciser que la donation entre époux porte forcément sur 100 % en usufruit. Le cas échéant, l’époux survivant n’aura pas d’option.
Dans certains cas, il y aura un nécessaire partage des biens de l’époux décédé. C’est par exemple le cas lorsque le conjoint survivant a droit à la quotité disponible ou au quart en pleine propriété (+ 3/4 en usufruit). S’il y a assez de biens pour que chaque héritier ait sa part, cela ne posera pas de problème. Mais s’il n’y en a pas assez pour un partage équitable (par exemple, une maison et très peu d’épargne), on tombera dans le régime de l’indivision entre héritiers.
L’époux survivant bénéficiaire de la donation au dernier survivant peut aussi faire un « cantonnement ». Cela signifie qu’il peut renoncer à une partie des biens qu’il reçoit du fait de la donation. L’objectif est souvent de favoriser les enfants. Les biens auxquels il renonce seront alors dans la succession, et partagés entre les descendants.
Quels sont les avantages et inconvénients de la donation au dernier vivant ?
Depuis 2007 et la loi TEPA, le conjoint survivant est exonéré de droits de succession. Sachant cela, quel est l’intérêt de faire une donation au dernier vivant entre époux ? Il y en a en fait plusieurs, mais le principal reste qu’un tel acte protège le conjoint survivant.
Voici, selon nous, les principaux avantages de cette disposition :
- La donation entre époux permet d’améliorer les droits du conjoint survivant,
- La donation au dernier vivant n’est pas irrévocable : elle peut être annulée à tout moment (sauf si elle est intégrée dans le contrat de mariage),
- La donation entre époux supprime le droit de retour des frères et soeurs en l’absence d’enfants / d’ascendants du défunt,
- La donation entre époux permet de déshériter les parents (s’ils sont héritiers),
- La donation entre époux est totalement exonérée (loi TEPA de 2007) !
Bien sûr, la donation entre époux a aussi quelques inconvénients. Déjà, elle a un coût, quoi qu’acceptable. Elle implique aussi de passer devant notaire (recherche d’un professionnel du droit, prise de rdv…). Il reste toutefois possible de la consentir via testament, mais cette solution s’avère moins sécurisante qu’un acte authentique.
Faire une donation au dernier vivant : quels sont les frais?
Faire une donation au dernier vivant a un prix. L’acte authentique se réalise devant notaire : vous payerez donc des frais de notaire.
Il s’agit de frais d’acte non réglementés. Chaque notaire fixe donc librement son tarif pour une donation entre époux.
En règle générale, le coût d’une donation au dernier vivant n’attaque pas trop le compte bancaire. Comptez en moyenne 150 à 200 euros par donation. Et si chaque époux en consent une au profit de l’autre, il faudra doubler ce montant.
Donation au dernier vivant : quelle fiscalité ?
Qu’il y ait donation au dernier vivant ou non au sein d’un mariage, le conjoint survivant est on ne peut mieux protégé par la loi sur le plan fiscal.
Depuis 2007 (loi TEPA), il est tout bonnement exonéré de droits de succession sur la part qu’il reçoit. Même si la donation au dernier vivant lui permet de recevoir plus que prévu, il restera non taxé sur sa part.
Le partenaire pacsé est lui-aussi exonéré de droits de succession. Mais rappelons qu’il n’est pas possible de faire une donation au dernier vivant à un partenaire de Pacs.
Donation entre époux et divorce
Le divorce met fin au mariage et, avec lui, à la donation au dernier vivant.
Le divorce est d’ailleurs la seule « méthode » pour annuler une donation entre époux intégrée dans le contrat de mariage. Rappelons que si elle est faite dans un acte séparé, elle est révocable à tout moment par l’époux qui la consent.
En cas de divorce, les ex-époux ne sont plus héritiers l’un de l’autre. Il est donc logique que la donation entre époux tombe aussi.
bonsoir
Nous avons fait la donation au dernier vivant , j’aimerai savoir si je veux vendre m’a maison au décès de l’un ,dois-je demander l’autorisation aux enfants
Cordialement Mme Jacq
Bonsoir,
En général, les enfants doivent donner leur accord lorsque l’un des parents est décédé.
Bonjour.
Pour un couple sans enfants, ayant mis en place une donation au dernier vivant, qui sont les héritiers des biens après le décès du conjoint survivant, (c’est à dire après les décès effectifs des deux membres du couple).
Est-ce que cela se traduit, sans s’en rendre vraiment compte, au profit exclusif d’une famille (celle du conjoint survivant) et au détriment total d’une autre (celle du conjoint décédé en premier)?
Merci pour votre réponse.
Cordialement
Bonjour,
Malgré la donation au dernier vivant, il reste la réserve héréditaire qui est la part minimale à transmettre aux héritiers.
Le mieux dans votre situation est d’en parler avec un notaire pour vous protéger l’un et l’autre puis que cela soit juste entre vos familles.
Parmi les solutions, si vous avez liquidités, l’assurance vie pourra être une solution intéressante en vous donnant la possibilité de choisir les bénéficiaires, de profiter d’une fiscalité avantageuse dans la transmission et de vous assurer d’une équité dans le partage sur la partie liquide de votre patrimoine.
Bonjour ,
Mon épouse est décédée , nous sommes un remariage avec 2 enfants de chaque coté . Nous avons fait en 1996 une donation entre époux . nous avons une maison comme bien . Si je veux vendre ce bien quelle part dois-je verser à ces 2 enfants en pourcentage . cordialement & merci pour votre réponse .
J. B
Bonjour,
Je suis désolé pour la perte de votre épouse.
Concernant votre question, la part à verser aux enfants dépend du régime de la donation entre époux et des droits légaux applicables. Si la maison était un bien commun, la donation entre époux vous permet de choisir entre trois options :
En cas de vente, si vous détenez la maison en usufruit et les enfants en nue-propriété, le produit de la vente est réparti selon leur part respective dans l’usufruit et la nue-propriété. Pour un calcul précis, il serait préférable de consulter un notaire qui pourra tenir compte de la valeur de l’usufruit en fonction de votre âge et de la situation juridique exacte du bien.