De nombreuses SCPI voient le jour en 2025, dans la continuité de ce que l’on a pu observer en 2024. Certaines sont portées par des sociétés de gestion déjà bien établies, d’autres par de nouveaux venus qui tentent leur chance dans un contexte de marché toujours exigeant. Tour d’horizon des SCPI en cours de lancement, avec un premier avis basé sur les informations disponibles à ce stade.
Un marché dynamique malgré un contexte économique tendu
Malgré un environnement encore compliqué pour l’épargne immobilière, avec des taux de crédit élevés, une collecte SCPI en baisse et concentrée sur quelques acteurs, des incertitudes politiques, et des rendements sous pression, les projets de création de nouvelles SCPI continuent de fleurir.
Pas moins de 9 SCPI sont actuellement en cours d’agrément ou récemment immatriculées, avec des positionnements très variés : santé, international, défiscalisation, généralistes… Certaines initiatives sont portées par des gestionnaires reconnus, d’autres par de nouveaux venus au positionnement plus incertain. Tour d’horizon de ces potentiels véhicules d’investissement.
SCPI Esprit Horizon
Esprit Horizon est une SCPI à capital variable récemment créée, avec un positionnement thématique affirmé : investir dans les parcs et locaux d’activités, un segment perçu comme résilient face aux mutations économiques actuelles. L’objectif annoncé est classique dans les SCPI nouvellement créées : un rendement cible de 6 % brut, avec une distribution mensuelle.
Derrière cette SCPI, on retrouve Spirit REIM Services, une structure issue du groupe Spirit, acteur bien établi de l’immobilier tertiaire et résidentiel. Ce gestionnaire revendique plus de 470 M€ de volume d’affaires, et une présence historique sur les parcs d’activités, notamment via ses SCI privées comme Esprit Pierre ou Esprit Pierre Plus. Mais sur le segment SCPI accessible au grand public, Spirit REIM n’a pas encore de track-record éprouvé : Esprit Horizon est son premier véhicule collectif à capital variable diffusé en large distribution.
Autre frein potentiel : un délai de jouissance long (1er jour du 6e mois) qui risque de dissuader les épargnants en quête de rendement rapide. Les frais sont dans la moyenne haute : 6 % de souscription, 15,6 % de gestion TTC, auxquels s’ajoutent divers frais d’acquisition, de suivi de travaux, etc.
Dans un marché où la collecte SCPI est très disparate et centrée sur quelques acteurs, il est difficile de comprendre comment Esprit Horizon va réussir à se démarquer et entrer dans un cycle vertueux de collecte, acquisitions, revalorisation. L’intention est louable avec la volonté de créer une SCPI ancrée dans l’économie réelle, au service des PME mais le timing et l’absence de marque forte sur ce créneau SCPI peuvent jouer contre elle.
En l’état actuel, Esprit Horizon n’est pas une SCPI que je recommanderais, car je trouve qu’il y a trop d’incertitudes qui pèsent sur sa capacité à se financer durablement, à saisir des opportunités attractives sur le marché, et à installer un cycle de performance récurrente.
SCPI Principal Inside
Principal Inside est une SCPI à capital variable lancée par Principal Real Estate, branche européenne de Principal Financial Group, gestionnaire d’actifs américain d’envergure mondiale. Le projet affiche une stratégie résolument internationale : investir 50 % du portefeuille aux États-Unis et 50 % en Europe, hors France. Un positionnement ambitieux et relativement inédit sur le marché, qui rappelle la démarche de certains acteurs ayant tenté l’aventure américaine.
Ce projet repose sur une logique de diversification géographique, en s’appuyant sur les implantations locales du groupe, notamment à Chicago, Francfort, Amsterdam ou Madrid. La promesse est d’aller chercher de la performance sur des marchés dynamiques, mais souvent méconnus des investisseurs français.
Cependant, malgré le sérieux du sponsor institutionnel, la SCPI démarre avec très peu d’éléments tangibles sur sa politique d’investissement. Aucune acquisition annoncée, ni détail sur les typologies d’actifs visés. La société de gestion, toute récente, ne dispose pas d’expérience directe dans l’univers réglementé des SCPI, ce qui soulève des questions sur sa capacité à structurer une offre compétitive, à collecter durablement et à séduire les réseaux de distribution.
Dans un environnement où les épargnants se montrent de plus en plus sélectifs, il faudra plus qu’un nom international pour s’imposer.
SCPI Kyaneos Denormandie 5 (KDN5)
Kyaneos Denormandie 5 est une SCPI à capital fixe qui n’a, à ce jour, pas encore reçu son agrément AMF. Ce cinquième millésime s’inscrit dans la continuité d’une gamme de SCPI fiscales lancée par Kyaneos.
Le principe reste le même que les précédentes SCPI : investir dans de l’immobilier ancien à rénover dans des villes moyennes, éligibles au dispositif fiscal Denormandie. Cette SCPI permettra d’obtenir une réduction d’impôt étalée dans le temps pour l’investisseur, en échange d’un engagement de conservation et d’une absence de liquidité jusqu’à la dissolution du fonds.
Le problème de fond n’a pas changé : la SCPI fiscale est un produit rigide, peu lisible en termes de performance globale, et dont le rendement repose autant sur l’économie d’impôt que sur la revalorisation à terme… La rentabilité réelle, une fois intégrés les frais, la fiscalité résiduelle et le manque de liquidité, reste à démontrer.
Cela ne signifie pas que le produit est mauvais, ni que Kyaneos est un acteur à écarter. Mais il serait intéressant de réaliser une étude plus approfondie sur les premiers véhicules lancés par la société, notamment pour analyser les TRI réalisés ou en cours.
SCPI Urban DNO
Urban DNO est la nouvelle SCPI fiscale lancée par Urban Premium. Ce véhicule s’inscrit aussi dans le cadre du dispositif Denormandie, avec une promesse de réduction d’impôt de 21 % sur 12 ans, contre une durée de blocage des fonds de 16 ans.
Le schéma est classique : constitution d’un patrimoine résidentiel dans des communes éligibles, rénovation énergétique, location encadrée, puis revente à terme. Le tout enrobé d’un discours sur l’utilité sociale et la participation à la transition énergétique du logement…blablabla.
Mais au-delà de la mécanique fiscale bien huilée, plusieurs limites structurelles subsistent. La SCPI ne commencera à distribuer des revenus qu’à partir de 2028 (quand les travaux auront été effectués et les biens loués), au mieux. Le problème reste un marché secondaire inexistant, et donc une absence totale de liquidité pendant toute la durée de vie du produit. La performance globale d’un investissement comme celui-ci est dépendante de la plus-value à la revente, dans un horizon lointain et un marché incertain.
Urban Premium a certes une certaine expérience sur les SCPI fiscales, mais cela ne garantit pas la pertinence du produit pour autant. La valeur de ce type de SCPI réside presque exclusivement dans l’économie d’impôt, et il reste difficile d’évaluer leur efficacité réelle tant que les précédents millésimes n’ont pas été liquidés.
SCPI Remake UK 2025
Remake UK 2025 est la nouvelle SCPI à capital fixe lancée par Remake après Remake Live. Contrairement aux SCPI classiques à capital variable en collecte permanente, ce fonds adopte une logique millésimée, avec une période de souscription limitée, une taille de capital stabilisée, et un horizon d’investissement défini dès le départ, à 7 ans (un peu court à mes yeux pour pleinement profiter d’un cycle).
L’objectif affiché est clair : capter les opportunités d’un cycle de marché favorable au Royaume-Uni, après une correction des prix de l’immobilier d’entreprise et dans un contexte anticipé de détente des taux. La SCPI vise un TRI cible supérieur à 9 % (!!), dont 6,5 % de taux de distribution annuel, sur une durée cible de 7 ans. L’investissement commence à partir de 10 000 €, et les premières acquisitions cibleront l’immobilier britannique.
Cette approche innovante n’est pas sans contrepartie. Miser sur un marché étranger hors zone euro expose naturellement à un risque de change, à une évolution réglementaire incertaine, et à des dynamiques économiques spécifiques. De plus, la liquidité dépendra du marché secondaire et oblige à trouver une contrepartie.
Pour autant, on peut saluer une démarche qui tranche avec le marché actuel. La société de gestion affirme ici des convictions fortes, une stratégie d’allocation bien définie, et un format pensé pour maximiser le rendement au bon moment du cycle. Ce n’est pas une SCPI pour tous les profils, mais qui s’inscrit parfaitement dans une logique de diversification immobilière.
SCPI Euryale Horizons Santé
Avec Euryale Horizons Santé, Euryale lance une nouvelle SCPI de rendement dédiée à l’immobilier de santé, du bien-être et des sciences de la vie. Cette initiative intervient plus de dix ans après le lancement de Pierval Santé, qui constitue aujourd’hui l’un des plus gros véhicules européens du secteur.
À première vue, Euryale Horizons Santé reprend les grands principes de son aînée : un positionnement sur un secteur perçu comme résilient, une approche ESG affirmée, et un discours d’engagement fort au service de la société. Mais cette fois, la stratégie revendique une diversification sectorielle plus large en intégrant par exemple des laboratoires, des centres de recherche, de la logistique pharmaceutique, ou encore des établissements de thalassothérapie. L’objectif est aussi d’avoir une ouverture géographique marquée vers l’Amérique du Nord, qui pourrait représenter 35 % du portefeuille.
L’objectif est clair : capter des dynamiques structurelles comme le vieillissement de la population, l’innovation médicale ou la demande croissante en infrastructures de santé. L’investissement est ouvert dès 1 000 €, avec des revenus potentiellement trimestriels et une jouissance différée au 1er jour du 5e mois.
On peut saluer la cohérence de la démarche, la continuité stratégique et l’expérience reconnue d’Euryale sur ce segment. Mais à ce stade, difficile d’y voir une véritable innovation, ni une réponse différenciante à la conjoncture actuelle du marché immobilier. Il faudrait surtout commencer par s’assurer que les revenus de Pierval Santé ne continue pas de décroître.
SCPI Newgen
Lancée par la société de gestion Aroxys, Newgen est une SCPI à capital variable qui se veut résolument tournée vers les usages de demain. Elle vise un portefeuille diversifié en Europe, avec une sélection rigoureuse des pays d’investissement selon des critères de croissance démographique, de PIB par habitant, de valorisation potentielle ou encore de stabilité économique.
Le discours est ambitieux : proposer une SCPI accessible dès 100 €, pilotée selon une logique institutionnelle mais pensée pour les investisseurs particuliers. Le tout avec un objectif de rendement de 7 % brut et un TRI cible de 6 % sur 10 ans (objectifs non garantis). La SCPI est labellisée ELTIF, ce qui permet à des investisseurs européens non professionnels d’y accéder dans un cadre réglementaire spécifique.
Le positionnement repose sur des promesses de modernité : interface 100 % digitale, options de réinvestissement automatique, investissement programmé ou encore démembrement optimisé.
Malgré un discours bien construit, la société de gestion Aroxys reste encore peu connue dans l’univers des SCPI même si elle est active dans l’immobilier et le capital-investissement depuis plusieurs années. Elle a d’ailleurs déjà lancé une SCPI fiscale qui n’est pas un grand succès (moins de 2 millions d’euros collectés depuis son lancement en 2022). À ce stade, peu d’informations concrètes circulent sur les actifs cibles, la politique d’endettement ou le rythme de déploiement.
Newgen revendique une structuration moderne et une démarche opportuniste. Pourquoi pas. Reste à savoir si cette volonté de coller aux tendances de marché pourra se traduire par une performance réelle et une collecte plus conséquente que sur DÉFICITIMMO.
SCPI Telamon Borea
Telamon Borea est la première SCPI lancée par le groupe Telamon, un promoteur et gestionnaire d’actifs immobilier jusque-là relativement discret. La société entend proposer une SCPI diversifiée et européenne.
Le fonds est tourné vers la logistique européenne, les parcs d’activités, et l’immobilier de rendement classique. À ce stade, difficile de discerner une ligne directrice entre les promesses de diversification géographique, les ambitions de collecte, et le discours marketing. La société a un historique tourné vers la promotion et la logistique et ne semble pas forcément vouloir tout miser sur son expertise.
De plus, la société de gestion ne dispose pas d’expérience dans le domaine des SCPI. Comme beaucoup de nouveaux entrants, elle vise haut : 100 millions d’euros de capitalisation en un an, un taux de distribution de 6,25 %, et une promesse de rythme d’investissement rapide. La première acquisition a été faite au Royaume-Uni dans la banlieue de Londres pour un montant de 4,6 millions d’euros.
Le pari de la performance est possible, mais repose sur une capacité d’exécution qui reste à prouver.
SCPI Iroko Atlas
Iroko Atlas est la nouvelle SCPI de rendement lancée en 2025 par Iroko après le succès d’Iroko Zen. Elle se veut plus agile et résolument tournée vers l’international : la totalité du patrimoine sera investie hors de France, principalement en Europe de l’Ouest, avec des opportunités en Europe centrale et même en Amérique du Nord lorsque les conditions seront favorables.
Le modèle de frais reste similaire : pas de frais de souscription (0 %) pour encourager une meilleure conversion de l’épargne en immobilier, mais des frais de gestion un peu plus élevés. Une stratégie gagnant gagnant pour l’instant pour les investisseurs d’Iroko Zen.
La première phase de collecte a témoigné de l’attrait du marché : 20 millions d’euros ont été souscrits en quelques heures, avec une décote de 9 % (prix de part à 182 € au lieu de 200 €). Une seconde phase a été fixée, limitée à 10 millions d’euros, à un prix de 192 €, soit une décote plus modeste de 4 % dans les prochains jours. Cela risque encore de partir très vite.
En termes de perspectives, Iroko Atlas vise un taux de distribution brut de 6,50 % et un TRI sur 10 ans de 7,00 % (non garantis). Pour constituer son portefeuille, Iroko adopte une approche granulaire, en ciblant des actifs de taille modeste (1 à 10 M€), dans des marchés souvent moins concurrencés.
Alors qu’Iroko Zen s’embourgeoise, Iroko Atlas se positionne comme une alternative plus dynamique, plus opportuniste. Pour un investisseur souhaitant rester dans l’écosystème Iroko tout en retrouvant une forme d’agilité et de potentiel offensif, Atlas peut incarner ce renouveau. Tout reste évidemment à démontrer, mais jusqu’ici, la gestion d’Iroko s’est montrée exemplaire, rappelant par certains aspects l’audace de Corum à ses débuts.
Conclusion : une multiplication des véhicules… pas toujours pertinente ?
Certaines initiatives se démarquent par leur audace, la confiance que l’on accorde au gestionnaire et leur lecture du cycle. Mais pour la majorité des nouvelles SCPI, la question centrale reste celle de la collecte. Car sans collecte suffisante, pas d’acquisitions, pas de mutualisation, et très peu de perspectives de performance. On peut se demander ce qu’il adviendra de ces véhicules s’ils peinent à atteindre une taille critique. Vont-ils disparaître discrètement ? Être fusionnés ? Rachetés par des gestionnaires plus installés ? Difficile à dire aujourd’hui, mais une chose est certaine : une SCPI qui ne dépasse pas un certain seuil d’encours, autour de 80 millions d’euros selon les modèles, aura du mal à couvrir ses frais fixes (personnel, structure, rétrocessions, acquisition) et donc à fonctionner durablement.
Un autre point de vigilance concerne les SCPI qui comptent sur la distribution en assurance vie. Si cela peut accélérer la collecte, encore faut-il que les assureurs soient sélectifs et que la liquidité reste gérable. L’épisode de la SCI Capimmo a rappelé à tout le monde qu’un excès d’encours peut créer de grosses tensions.
Enfin, il faut rappeler que l’investissement en SCPI, c’est de l’immobilier. C’est du temps long, de la gestion patiente, et de la lisibilité dans le temps. Contrairement à une action ou une obligation, il n’y a pas de prix de marché quotidien ni de sortie immédiate. Pour toutes ces raisons, je recommande d’attendre avant de se positionner sur ces nouvelles SCPI, sauf si l’on a une réelle conviction sur la société de gestion.
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