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Communauté réduite aux acquêts : est-ce un bon régime de mariage ?

Expert
Posté par
Benoît Fruchard
Mis à jour le
24 janvier 2023

Un régime matrimonial permet de définir le mode de gestion des biens, de transmission et de partage en cas de divorce. En France, le régime par défaut est celui de la communauté réduite aux acquêts. Il s’applique automatiquement sans passer par la case notaire. Mais est-ce un bon régime de mariage ? On fait le point !

Qu’est-ce que le régime de la communauté réduite aux acquêts ?

Le régime de la communauté réduite aux acquêts est le régime matrimonial qui s’applique d’office sans avoir besoin de rédiger un contrat de mariage. Le principe de la communauté réduite aux acquêts est relativement simple.

Concrètement, les époux conservent leurs biens propres c’est-à-dire ceux qu’ils ont acquis personnellement avant le mariage. En revanche, l’ensemble des biens acquis et les dettes contractées pendant le mariage sont mis en commun. La seule exception concerne les biens reçus par une donation ou dans le cadre d’une succession.

Comment fonctionne la communauté réduite aux acquêts ?

Voyons en détail la gestion des biens et les conséquences d’un divorce et d’une succession sous la communauté réduite aux acquêts !

La gestion des biens avec la communauté réduite aux acquêts

La communauté réduite aux acquêts distingue les biens propres et les biens communs des époux.

Biens propres

  • Biens possédés par un époux avant le mariage
  • Biens reçus par donation ou succession
  • Indemnités réparant un préjudice corporel ou moral subi par un époux
  • Don manuel
  • Vêtements, etc…

Biens communs

  • Biens immobiliers acquis pendant le mariage
  • Pensions de retraite
  • Revenus d’épargne et de placements
  • Gain de jeux
  • Salaires et revenus professionnels

Concrètement, vous disposez librement de leur bien propre et des revenus qui génèrent. Concernant le patrimoine commun, c’est-à-dire celui constitué après le mariage, vous pouvez effectuer seul les actes de gestion sans avoir besoin de demander l’accord à votre conjoint.

Toutefois, certains actes nécessitent d’obtenir l’accord de votre conjoint notamment dans les situations suivantes :

  • Signature d’un bail d’un fonds rural ou d’un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal,
  • Vente ou donation d’un bien commun,
  • La résidence principale et ce même s’il s’agit d’un bien propre. Vous ne pouvez pas en disposer librement sans l’accord de votre conjoint conformément à l’article 215 du Code civil.

Concernant les dettes, tout dépend les situations dans lesquelles elles ont été contractées, à savoir :

  • Les dettes pendant le mariage : Elles engagent les deux époux dès lors qu’elles concernent les obligations d’entretien du ménage ou éducation des enfants (alimentation, factures, frais scolaires…). Mais cette solidarité des dettes ne s’applique pas si l’un de vous fait des dépenses excessives par rapport au budget du ménage.
  • Les emprunts : À partir du moment où les deux époux ont donné leur consentement, ils sont solidaires. Si un seul a contracté un crédit, alors seuls ses biens propres et ses revenus sont engagés, sauf si l’emprunt concerne les besoins de la vie courante tant que son montant n’est pas excessif.
  • La signature d’une caution : Dans ce cas, les époux sont solidaires uniquement si les deux ont donné leur consentement.

Les créanciers peuvent saisir les biens communs pour se rembourser.

Communauté réduite aux acquêts et divorce : quelles conséquences ?

Lors d’un divorce, chacun des époux conserve leurs biens propres et se partage les biens communs et les dettes. Le partage se fait alors en deux étapes :

  • Le partage des actifs : Il s’agit de la valeur des biens communs qui seront partagés en deux parts égales, sauf disposition contraire indiquée dans un contrat de mariage.
  • Le partage des passifs : Les ex-conjoints restent solidaires des dettes contractées pendant le mariage. Dans le cas d’un crédit, un des époux peut éventuellement se désolidariser s’il ‘n’a pas consenti au crédit et s’il ne concerne pas les besoins du ménage.

Concernant la résidence principale, plusieurs cas de figure peuvent se présenter :

  • Domicile acheté avant ou pendant le mariage par les deux époux : La résidence est alors un bien indivis qui ne rentre pas dans la communauté. Dans ce cas, un des époux peut choisir de racheter la part de l’autre. Mais les époux peuvent aussi décider de le vendre et de récupérer la part qui leur revient ou de garder le bien en indivision et le mettre en location.
  • Domicile acheté par un seul des époux : La résidence est alors un bien propre. Mais comme il concerne le domicile conjugal, l’époux propriétaire peut se voir demander de rembourser à son ex-conjoint l’argent investi pendant le mariage, cela peut être par exemple une participation à des travaux de rénovation.

Le juge aux affaires familiales (JAF) peut accorder un bail sur la résidence principale à l’époux qui n’est pas propriétaire. Ce bail peut durer jusqu’à la majorité des enfants communs.

Communauté réduite aux acquêts et décès : quelles conséquences ?

Lors du décès d’un des conjoints, et ce quelle que soit le régime matrimonial choisi, le conjoint survivant reste propriétaire de ses biens propres et de la moitié des biens communs.

Ainsi,  la succession se fait sur les biens propres du défunt et sur l’autre moitié des biens communs lui appartenant.

Néanmoins, vous pouvez préparer la succession de votre vivant afin de protéger un peu plus votre conjoint ou vos enfants en cas de décès :

  • Testament : Vous pouvez léguer la totalité de la quotité disponible à votre conjoint ou à vos enfants.
  • Donation entre époux : À votre décès, le conjoint survivant a le choix entre la totalité du patrimoine en usufruit ou de la quotité disponible en pleine propriété. La donation entre époux ne prend donc effet qu’au décès de celui qui l’a consentie. 
  • Donation de son vivant : Ici vous pouvez décider de réaliser une donation au profit de votre conjoint. Le bien rentre alors dans le patrimoine du bénéficiaire.  

Le conjoint survivant est exonéré des droits de succession.

Quels sont les avantages et inconvénients de la communauté réduite aux acquêts ?

La communauté réduite aux acquêts est un régime matrimonial relativement simple qui a l’avantage d’être gratuit puisque c’est le régime par défaut. Il est appliqué automatiquement et ne nécessite pas de passage chez le notaire.

Mais avant d’adopter ce régime par défaut, un bref récapitulatif des avantages et inconvénients s’impose :

Avantages 

  • En cas de divorce : Chacun des époux récupérant ces biens propres et la moitié des biens communs acquis durant le mariage. Avantage, notamment pour le conjoint sans activité professionnelle qui ne retrouve pas sans rien du jour au lendemain
  • En cas de décès : Le conjoint survivant récupère ses biens propres et la moitié des biens communs.
  • Les biens reçus en donation, succession ou financés avec un don d’argent familial sont des biens propres et ne rentrent pas dans la communauté.

Inconvénients 

  • La solidarité des dettes et crédits contractés pendant le mariage
  • Les créanciers peuvent se rembourser sur les biens communs.
  • En cas de divorce : le conjoint qui a les revenus les plus confortables peut se sentir lésé par le partage des biens communs.
  • La communauté réduite aux acquêts est basée sur la cogestion ce qui implique l’accord des deux époux concernant les décisions importantes (acquisition ou vente d’un bien immobilier pendant le mariage par exemple)

Mais nous allons voir que bien que ce soit un régime matrimonial par défaut, il peut être aménagé grâce à un contrat de mariage.

Qu’est-ce que la communauté réduite aux acquêts aménagée ?

Vous avez donc la possibilité d’aménager la communauté réduite aux acquêts par la signature d’un contrat de mariage devant notaire. Ce qui vous permet ainsi d’organiser de manière précise la répartition des biens.

Aussi, vous pouvez par exemple insérer les clauses suivantes :

  • Clause d’attribution intégrale : La totalité des biens communs des époux est attribuée au conjoint survivant. Clause la plus protectrice pour l’époux restant, mais elle désavantage les enfants.
  • Claude de préciput : Vous pouvez désigner dans cette clause, un bien que l’époux survivant recevra automatiquement à votre décès. Par exemple, elle peut concerner la résidence principale afin que le conjoint récupère l’entière propriété à votre décès.
  • Clause de partage inégal : Vous pouvez prévoir que les biens communs seront partagés de manière inégale en cas de divorce, mais aussi de décès.

Vous pouvez modifier votre régime matrimonial à tout moment en faisant appel ç un notaire. En revanche, sachez que vos créanciers sont informés par une publication dans un journal d’annonces légales. De même vous devez obligatoirement en informer vos enfants majeurs. Ils auront trois mois pour s’opposer à votre projet (Code civil, article 1397).

Communauté réduite aux acquêts : pour qui est-ce intéressant ?

La communauté réduite aux acquêts est intéressante dans la mesure où vous conservez vos biens propres contrairement à la communauté universelle. Ainsi vous protégez votre patrimoine personnel.

Toutefois, ce régime trouve ces limites dès que se présente une situation familiale ou patrimoniale particulière. C’est le cas notamment lors qu’un des deux époux exerce une activité indépendante. En effet, les dettes rentrent dans la communauté et les créanciers peuvent se rembourser sur les biens communs.

De même, si vous créez ou reprenez une entreprise pendant le mariage, elle rentre dans la communauté et donc est soumise à la gestion conjointe. Aussi, vous ne pouvez pas céder le fonds de commerce sans le consentement de votre conjoint. De plus, elle peut servir de patrimoine pour payer les dettes communes. Pour finir, le conjoint non exploitant a droit à la moitié de sa valeur en cas de divorce.

En tout état de cause, il est conseillé de rédiger un contrat de mariage afin d’éviter tout conflit, notamment lors d’un divorce. N’hésitez donc pas à demander conseil à des experts afin de vous guider dans le choix du meilleur régime matrimonial en fonction de votre situation financière.

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